Skip to main content

L’agence bancaire intuitive

Par 13 février 2013Un commentaire12 minutes de lecture
|

Une agence bancaire est l’interface physique entre une banque et ses clients.

C’est le lieu principal où se signent les contrats qui lient les clients et leurs banques. Ces contrats sont de trois types : des prêts, des placements, des services pour les particuliers ou pour les professionnels.

Qu’attend une banque de ces échanges, et qu’attendent les clients de leur agence ?

Un client achète la réalisation d’un besoin, pas un produit. La banque vend des produits et services. Est-ce là une équation impossible à résoudre ou l’opportunité de redéfinir les relations Banque – Clients à travers cette interface que constitue l’agence ?

Aujourd’hui, seulement 2 français sur 10 considèrent la banque comme partenaire pour réaliser leurs projets. Le divorce est donc consommé. Voir par ailleurs Les banques face à l’opinion publique par Jérôme Fourquet sur le site jean-jaures.org.

Or, qu’on le veuille ou non, la banque est en capacité d’être partie prenante de la plupart des besoins, des projets des clients.

Faut-il encore que l’interface agence/clients fonctionne de manière efficiente…

Comprendre les besoins de la banque

Une banque est un intermédiaire entre les personnes qui ont de l’argent et celles qui l’empruntent. L’art du banquier est d’être capable de transformer les ressources court terme aux demandes de financement à long terme de l’économie. (voir : Le fonctionnement du bilan des banques) Cela sans avoir de problèmes de liquidités si les clients décident de retirer leur argent ou si une crise du marché interbancaire coupe l’accès aux liquidités. C’est la doctrine «Germain» qui sera détaillée dans la rubrique histoire bancaire de CultureBanque.

Une banque doit donc être capable d’attirer les ressources (ce qui coûte cher en livrets boostés !), de les stabiliser en épargne à moyen ou long terme et de financer l’économie en distribuant des prêts moyennant un prix : le taux d’intérêt.

La concurrence est très dure et la guerre des prix (des taux) est telle que le PNB (produit net bancaire) issu de la marge d’intérêts est devenu volatil. En 2007 une banque margeait à 3 ou 4% sur les ressources et cela représentait parfois plus de 50% du PNB. Si l’on se réfère aux marges actuelles sur les ressources, la baisse du PNB à venir est un sujet alarmant pour la banque de détail. Ajoutez à cela une probable baisse des marges sur les prêts immobiliers liée à la pression concurrentielle actuelle, et vous vous retrouvez sur le thème de la réduction des charges pour conserver le résultat d’exploitation.

Certains réseaux réfléchissent déjà à la fermeture d’agences. D’autres ouvrent la porte à des négociations de ruptures conventionnelles pour la génération proche de la retraite.

Les enjeux complémentaires à prendre en compte sont la multi bancarisation, la baisse de fréquentation des agences avec la priorisation des contacts via Internet (1), l’impact de Bâle III qui repositionne la captation d’épargne en priorité numéro 1, les nouveaux concurrents qui ne se trouvent sans doute pas où on les cherche (voir publication sur les nouveaux entrants sur le marché du patrimoine sur culture banque).

La conquête de nouveaux clients et le développement du PNB doivent se faire sur la qualité de service perçue par le client et l’innovation dans les services.

Cela passera par une redéfinition de la fonction de l’agence bancaire car le maillage du territoire reste nécessaire à la captation des ressources ; autrement dit, au lieu de fermer des agences, travaillons sur une redéfinition de leur fonction.

Cette fongibilité fonctionnelle passe par deux axes :

  • L’intégration des réseaux sociaux à l’interface pour en augmenter la surface,
  • La maîtrise du parcours client par le conseiller commercial.

Concilier les besoins de la banque et ceux des clients

L’équation semble difficile à résoudre : la banque a besoin de ressources pas chères, les clients veulent des taux d’intérêts forts pour leurs placements. La banque a besoin de faire de la marge sur les prêts, les clients veulent toujours un taux de prêt le plus bas possible. Et pour les services,  il faut en avoir la culture, sinon c’est compliqué, même si cela se travaille au prix d’un budget formation élevé et difficile à piloter en terme de retour sur investissement. Pour articuler l’ensemble, la banque est dotée de managers, pilotes des agences bancaires et de la relation client (voir la fiche métier du directeur d’agence bancaire).

Revenons à Henry Ford : «Ce n’est pas l’employeur qui paie les salaires, mais le client ».

C’est donc à la banque de s’adapter aux besoins de ses clients.

Un client bancaire, ce n’est pas simple. Souvent, il a plus besoin de SAV que d’achat de produits. Il a besoin d’une relation de confiance qui doit être animée au fil du temps. Il a besoin de réactivité, d’informations, de solutions, d’être sécurisé dans ses projets. Il demande du professionnalisme et du conseil de la part du conseiller.

L’agence bancaire doit apporter une valeur ajoutée

Elle doit réinventer l’attention prêtée aux clients et aux conseillers bancaires.

Pourquoi aussi aux conseillers?

Car ce sont eux qui sont la surface de contact de l’interface «banque -clients». Ce sont eux qui font la production qui se transforme en PNB. Ils doivent changer leurs pratiques du métier pour aller vers une co-production personnalisée des solutions avec le client. Le conseiller doit être capable de transformer ce qui a de la valeur pour le client en valeur pour l’entreprise bancaire.

Le conseiller n’est pas le seul point de contact, l’Internet devient plus utilisé que la visite en agence dans le parcours client.

Séisme pour la banque de détail !

Alors que l’ensemble des clients a adopté l’Internet (1) et ses réseaux sociaux, la banque ne sait pas comment se positionner sur le sujet. Les clients sont connectés, les conseillers sont connectés (au grand dam des managers qui voient cela comme une menace à la productivité en agence en allant jusqu’à faire la chasse aux smart phones) mais la banque (et donc l’agence) n’est pas connectée aux clients. C’est un problème qui doit se transformer en opportunités pour la création de valeur.

La nouvelle agence bancaire doit donc intégrer ce nouveau besoin d’être connecté à sa banque, à son agence. L’agence doit fonctionner comme une application de smartphone, intuitive à ses clients.

L’ensemble des points de contacts entre les clients et la banque doit être piloté par l’agence pour que celle-ci soit en mesure de transformer l’information captée par le multi canal en opportunités de business. C’est cette proximité qui est le garant d’une relation de confiance durable et d’une adéquation entre les besoins du client et les enjeux de la banque.

C’est à la banque de surprendre son client pour lui permettre d’utiliser l’ensemble de la surface de contact de l’interface.

Comment transformer cette volonté concrètement ?

En premier lieu, bien comprendre ce que veut le client et mettre en oeuvre une réponse :

  • La réactivité, la disponibilité, la recherche d’informations dans le parcours de prise de décision du client représentent des sujets qui, si ils ne sont pas traités efficacement, produisent autant de raisons aux clients d’aller chercher ces services simples chez un concurrent. La surface de contact de l’interface doit donc être largement augmentée pour permettre aux clients de profiter véritablement du multi canal et ne plus être soumis aux contraintes des horaires d’ouvertures des agences ou de la capacité de celles-ci à décrocher au téléphone.

La solution existante est la plate forme téléphonique. Elle est impersonnelle et n’est pas plébiscitée par les clients.

  • L’agence doit avoir une nouvelle fonction : celle d’être un point de contact intégrant en ses murs le canal internet. Une fonction dédiée, en agence, doit répondre à cette demande du client. L’agence doit avoir son propre site internet, et doit savoir piloter son propre réseau social : sa propre page facebook, son compte twitter. Cela permettra d’interagir avec l’environnement de l’agence sous la responsabilité d’un «manager de la communication» chargé d’animer l’ensemble des canaux de communication, d’animer l’interface Banque – Clients. Certaines banques sont déjà bien avancées sur le sujet et la qualité des interactions avec les clients et prospects. Cela semble valider ce nouveau mode de fonctionnement. D’autres banques n’ont toujours pas de compte twitter ouvert et une page facebook uniquement faite de communication vers les clients sans échange avec les clients.
  • Le professionnalisme des conseillers doit être ressenti par le client. Et là, il faut remettre la relation client sous le regard du parcours client. Le parcours client détermine ce qui construit la prise de décision d’achat d’un client, en partant du projet, de la recherche d’informations, de l’évaluation des choix possibles, de la négociation, de la vente et du SAV. Un conseiller sait vendre. Il doit aller plus loin en sachant  se positionner dans ce parcours et adapter sa posture en fonction du niveau où se situe son client dans le parcours. C’est par cet accompagnement du client en intervenant au bon moment avec le bon conseil que le conseiller apportera sa valeur ajoutée et donnera le signe de son professionnalisme. Pour cela, il faudra aller jusqu’au partage des logiciels sur le site de la banque. Pour un projet immobilier, le client va aller monter son projet dans l’agence puis pourra, depuis sa maison, retourner sur le site de la banque et se connecter en retrouvant la même interface partagée. Il pourra ajuster son apport, sa durée, etc…Nous serons dans une co-construction de la solution entre le client et le banquier. Le client sera lui-même le banquier.

Le rôle du manager de l’agence se retrouvera encore plus valorisé, véritable pilote du changement.

Le résultat de la 8ème Etude mondiale sur les consommateurs (2) effectuée par Accenture, peut faire réfléchir. Et si les nouveaux outils digitaux de conversation étaient les meilleurs leviers de consolidation de la relation client ?

Selon cette étude : « Les marques doivent créer l’expérience la plus pertinente à chaque point de passage du consommateur dans son processus d’achat.

Cela ne passe pas obligatoirement par plus de campagnes et de sites Web mais plutôt par une meilleure analyse pour s’assurer que chaque expérience et visite soit appropriées à chaque cible »,

L’idée est de rendre utile chaque visite d’un client via chaque porte d’entrée des canaux de distributions.

Les niveaux de maturité de chaque réseau sur ce sujet est un élément clé dans sa capacité à s’adapter au plus vite à cette transformation de fond de la relation client dans la banque.

Cette évolution dépendra du marché, des investissements possibles, des ressources humaines compétentes en matière de relation client.

La véritable performance d’une agence sera sa capacité à fonctionner comme une interface transformant les projets du client, ce qui a de la valeur pour lui, en solutions bancaires créatrices de valeur pour l’entreprise Banque.

Cette conduite du changement aura été un succès dès lors qu’un client dira :

« mon agence est intuitive »

« Opposer la banque de détail en agence à la banque en ligne est aujourd’hui dépassé. Le client vit dans un seul monde, celui de 2012, un monde plus complexe qu’il y a quelques années, plus riche d’interactions aussi. Le véritable enjeu pour une banque aujourd’hui consiste à répondre au mieux à cette modernisation de la relation » Virginie Fauvel directrice de la banque en ligne de BNP Paribas en Europe

Sources d’informations :

(1)Voir étude Xerfi sur les banques en région d’octobre 2012 et de l’argus de l’assurance du 02/03/2012 par exemple.

(2) publiée en 12/12 et réalisée auprès de 12 000 individus dans 32 pays du globe et concernant 10 industries différentes, Accenture Global Consumer

Nicolas Segard

Carrière dans un réseau en France, marché particulier, privé, professionnel, management d'unité. Responsable du développement des assurances dans une Direction de Réseau.

Un commentaire

Commenter