Le paiement instantané est une réalité dans de nombreux pays depuis quelques années. En Europe, un standard européen a été adopté pour son déploiement dans les 34 pays de la zone Sepa. Le Groupe BPCE a annoncé le déploiement progressif de l’Instant payment en France qui concernera les clients particuliers et entreprises.
Le Sepa Instant Credit Transfer (SCT Inst) est opérationnel depuis le 21 novembre 2017. Lors de ce lancement, de grands établissements européens ont immédiatement communiqué sur leurs offres de virements instantanés, paneuropéens ou pas. Seuls 585 établissements de huit Etats (Autriche, Allemagne, Estonie, Espagne, Italie, Lettonie, Lituanie et Pays-Bas) sur les 34 pays la zone Sepa avaient épousé le dispositif. On pouvait regretter alors l’absence d’acteurs français. Natixis, filiale de BPCE, se disait prêt à proposer des offres de paiement en temps réel à ses clients pour le printemps 2018.
Ce service va progressivement être proposé aux clients particuliers et professionnels du Groupe bancaire sur plusieurs cas d’usage qui laissent à penser que BPCE n’a pas souhaité lancer cette fonctionnalité de but en blanc, mais en y apportant une proposition de valeur pour le client. A l’occasion d’une conférence de presse qui s’est déroulée le 3 juillet, Yves Tyrode, directeur général en charge du digital, a par ailleurs expliqué que l’intégration de ce service avait entrainé une refonte de la fonction virement au sein des applications Banques Populaires et Caisses d’Epargne. Le parcours et l’ergonomie ont été revus. L’architecture pour cette opération est désormais la même pour les deux acteurs, entrainant aussi la mise à disposition d’un nouvel outil d’authentification renforcée : le Secur’pass (un code à quatre chiffres exigé pour chaque opération dite sensible comme l’ajout d’un bénéficiaire ou l’exécution d’un virement.
Pour la mise en place du paiement instantané, BPCE a décidé de s’aligner sur le standard européen, à savoir un traitement de l’opération en à peine dix secondes et un maximum de 15.000 euros par transaction. Aux Pays-Bas, il n’y a pas de plafond et le délai est de cinq secondes. Chez BPCE, l’instant payment va permettre :
- Une accélération de l’indemnisation en temps réel de ses assurés en cas de sinistre. C’est depuis le 10 juillet que Natixis Assurances offre un « service d’indemnisation en temps réel pour certaines garanties », parmi lesquelles les assurances des appareils multimédias, les assurances perte et vol des moyens de paiement et les garanties achat. Le service sera ensuite étendu aux assurances dommages. Concrètement, il s’agit, par exemple, de rembourser en temps réel (contre un délai de trois jours actuellement) l’appareil mobile cassé pour pouvoir le remplacer.
- La mise à disposition des fonds immédiatement dans le cadre d’un crédit à la consommation. Cette possibilité sera proposée en octobre prochain.
- Le paiement CtoC (consumer to consumer) et CtoB (Consumer to Business). Dès septembre prochain, il sera possible de réaliser un virement instantané depuis l’application pour rembourser un ami, régler un achat entre particuliers (ce qui sécurise les transactions, notamment celles qui peuvent avoir lieu sur des sites collaboratifs ou lors de brocantes ou vide-greniers) ou payer immédiatement l’intervention d’un plombier. Autre cas d’usage : faire un don à une association, qui se traduit en monnaie sonnante et trébuchante en temps réel. Pour l’heure, le virement en temps réel ne sera possible qu’entre clients Caisses d’Epargne et Banques Populaires.
- Le paiement en ligne. BPCE a signé un partenariat avec Air France qui ajoutera le paiement instantané en moyen de paiement sur son site, en plus de PayPal ou du paiement par carte. Cette initiative n’est pas sans rappeler celle de Deutsche Bank qui a signé un partenariat avec l’Association internationale du transport aérien. Les clients européens de la compagnie aérienne pourront prochainement payer leur billet d’avion ou régler une prestation avec ce nouveau mode de paiement. Un choix intéressant pour le consommateur qui ne réglera pas avec sa carte et ne risquera pas de consommer le plafond de cette dernière.
- La gestion de la trésorerie pour les entreprises. Puisque le règlement immédiat sera proposé par la filiale d’affacturage, Natixis Factor.
L’enjeu de l’Instant payment
Pour BPCE il s’agit d’être le premier sur un marché estimé entre 2 à 5 milliards d’euros de transactions en 2022. BPCE souhaite préempter ce marché et a pour ambition de traiter, à l’horizon 2022, près de 1,3 milliard d’euros de transactions instantanées chaque année.
L’Instant payment, ce sera moins de transactions par carte et donc un moyen de court-circuiter Visa et Mastercard et les commissions que les deux acteurs imposent. Ce mode de paiement devrait aussi entrainer une baisse de l’usage du chèque, dont le coût reste élevé pour les établissements bancaires. Enfin, c’est aussi moins de cash, comme le démontrent les exemples scandinaves en la matière.
Mais à l’occasion de la conférence de presse, une question a été soulevée : le coût du service. Si ce dernier « utilise de la technologie », comme l’a précisé Laurent Roubin, directeur général en charge de la banque de proximité, il aurait une valeur supplémentaire par rapport à un virement classique prenant deux à trois jours. La politique tarifaire en la matière ne serait donc pas arrêtée. Pas certain que ce service soit un succès et soit apprécié s’il devait être payant pour le consommateur. Pourtant, en Pologne, ce service est payant. Rappelons aussi que les virements classiques sont payants dans l’Hexagone quand il s’agit de la clientèle professionnelle.
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